jeudi 3 décembre 2009

Editorial du "Républicain" : La grande gêne


Adam Thiam- Le Républicain, 03/12/2009
Mali
jeudi 3 décembre 2009
En décodant les propos du Président de la République, et en écoutant les sources proches de l’enquête sur l’avion de Tarkint, on perçoit une grande gêne. Tout Malien doit partager cette gêne. Car elle part d’un souci de discrétion, trahie par la suite, mais une erreur tout de même de notre part en tant qu’Etat et qui devrait désormais nous édifier pour l’avenir.

Car notre pays a suffisamment de défis pour s’ajouter la mauvaise publicité résultant d’affaires aussi sensibles que le narcotrafic et les enlèvements d’otages. Là-dessus, ne nous faisons aucune illusion : même si la drogue ne fait que quelques heureux ici, en enrichissant une filière qui est en vérité internationale, c’est nous qui récolterons les pots cassés parce que nous sommes vulnérables de nos méthodes et de nos moyens. Et même si à l’exception de celui récent du Français à Ménaka les enlèvements se passent sur d’autres territoires, c’est chez nous qu’ils connaissent jusque-là leurs dénouements. Dans une sorte de happy end à la trame toujours mystérieuse. Ou dans le sang, quoiqu’exceptionnellement comme pour le Britannique Dwyer.

Indiscutablement, le pouvoir malien a un problème à s’approprier la communication de crise. On l’a remarqué avec les émeutes de Kita. On l’a remarqué avec les différents épisodes des conflits au Nord. On le remarque maintenant avec l’affaire de l’avion de Tarkint dont la presse dit qu’il a appartenu à la Libye alors que le gouvernement, selon nos enquêtes, n’a reçu aucune notification officielle sur ce sujet ! Mais espérons qu’il n’en sera pas de même pour les dépêches de ces dernières heures disant que les otages espagnols capturés en Mauritanie ont fini leurs courses au Nord-Mali.

Nous n’avons rien à cacher en tant que nation. Car l’initiative de la rencontre Sahélo-saharienne, seul cadre viable de la réponse au défi sécuritaire de cet espace, est une initiative du Mali. Or, elle est sans cesse ajournée par des angines diplomatiques à répétition. Tous nos voisins le savent pourtant : aucune de ces menaces comme l’a dit ATT n’est née au Mali. Cela ne saurait être un passeport pour l’inaction, certes. Mais il faut savoir que des Maliens ont déjà payé de leur sang le combat contre le salafisme.

Que notre pays aux ressources déjà limitées est obligé de se passer de plus d’écoles et de centres de santé pour équiper une armée qui ne pourrait que limiter les dégâts. Car ce n’est pas que l’espace sahélo-saharien n’est pas une bande. Mais une immensité de terres, de complicités, et de besoins. Or quand le GPS et le téléphone Thuraya unissent leurs adversaires, nos Etats continuent à s’étriper pour des broutilles.

Adam Thiam

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