TESHUMAR.BE est dedié à la CULTURE du peuple touareg? de ses voisins, et du monde. Ce blog, donne un aperçu de l actualité Sahelo-Saharienne. Photo : Avec Jeremie Reichenbach lors du Tournage du film documentaire : « Les guitares de la résistance Touaregue », à la mythique montée de SALUT-HAW-HAW, dans le Tassili n’Ajjer-Djanet- Algérie. 2004. Photo de Céline Pagny-Ghemari. – à Welcome To Tassili N'ajjer.
vendredi 29 mai 2009
Djoliba, le fleuve qui lave tout
29 mai 2009
Djoliba, le fleuve qui lave tout
"ceci est valable pour Niamey aussi"
Liberation.fr
Assainssement à Bko (3) recad On dit en Bretagne que "la mer lave tout". Ça a longtemps été l'excuse pour balancer tout et n'importe quoi sur la grève. J'ai l'impression que l'on pourrait appliquer cette formule au Mali avec le fleuve Niger (Djoliba): "Le fleuve lave tout". Quand on regarde la politique de gestion des eaux pluviales et des eaux domestiques, on est affolé par ce que va devenir le fleuve dans les années qui viennent. Quant aux problèmes de santé publique...
Mois de mai. Le taux d'humidité remonte tranquillement. On passe de 15% à 50%, voire à 70% d'humidité. Les premiers orages tombent sur Bamako. Une pluie de 60mm, en deux ou trois heures, dans une ville dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle n'est pas construite sur une morne plaine, ça donne un écoulement intense. C'est la grande lessive des égouts et des places publiques (en particulier les marchés et les gares routières).
Pluie Bko (6) Le spectacle qui suit une grosse pluie en certains endroits de Bamako est hallucinant: des routes couvertes de déchets, de boues, empêchant même parfois une circulation normale, et tout le monde qui patauge là-dedans... Les légumes du marché du lendemain sont forcément inondés (je vous conseille fortement de les passer à l'eau de javel ou au permanganate de potassium si vous ne voulez pas vous retrouver le lendemain, au mieux, vissé pour la journée sur les chiottes).
Mais c'est aussi le fleuve qui en prend un coup, et surtout toute la faune qui y subsiste. Vivre en aval de Bamako à certaines périodes de l'année ne doit pas être toujours drôle. Il n'y a déjà plus grand chose mais le choc d'une telle pluie, avec l'ensemble des immondices qui arrivent d'un seul coup dans le fleuve, doit être fatal à tout un tas de sympathiques petites bêtes.
Bamako, avec bientôt deux millions d'habitants, produit une quantité de déchets relativement importante, autant solides que liquides, même pour la capitale d'un pays considéré comme l'un des plus pauvres du monde. En 2006, la production des eaux usées domestiques de Bamako a été estimée à 32.000 m3/jour et celle des boues de vidange à 600.000 m3/an, selon les données disponibles à la DNACPN (Direction nationale de l'assainissement). Le traitement des eaux usées est individuel et ne concerne qu'un petit tiers de la population. Si une évacuation existe bien pour les résidus de fosses (à l'aide de camions avec pompe "SPIROS"), les deux stations de Bamako de traitement des boues sont largement insuffisantes et mal conçues. Les boues finissent très souvent déversées en pleine nature, voire dans le fleuve. Si celui-ci a un débit de crue qui atteint facilement 6000 m3/s, et permet donc une relative dilution, en étiage, il est seulement de 70 m3/s.
Assainssement à Bko (5) Au fur et à mesure que la saison sèche avance (octobre à mai), les égouts se remplissent peu à peu de déchets. C'est pratique un canal à ciel ouvert au bord des rues principales: pourquoi s'emmerder à aller chercher une poubelle? Ça sert à tout, on jette les ordures, on pisse, on défèque... et les eaux ménagères tranquillement déversées gardent le tout dans une bonne humidité qui, grâce aux quelque 40°C à l'ombre, aident à la prolifération de tout un tas de petites bêtes qui ont autant que nous le droit de vivre mais n'en demeurent pas moins nuisibles et néfastes pour notre santé.
La seule action vraiment visible est celle qui, quelques semaines avant les premières pluies, consiste à nettoyer les égouts. Dans un premier temps on procède au transfert des déchets de l'égout vers le trottoir, et dans un second temps, parfois si tardif qu'une pluie peut avoir le temps de tout disperser, un camion vient ramasser le tout et l'emmène vers ... je ne sais où, sans doute les champs et les vergers.
Le problème, c'est qu'une politique et des infrastructures d'assainissement, ça coûte très cher, et que Bamako doit pratiquement partir de zéro. Pour le moment, la seule station d'épuration sur Bamako, largement insuffisante, concerne la zone industrielle. Si des dépôts de transit existent (merci à la ville d'Angers), l'évacuation se fait ensuite "en brousse", un peu au hasard des champs. De toute façon, ça sert à enrichir la terre. Autre problème, l'urbanisation galopante de Bamako, coincée entre les collines et le fleuve, laisse peu de place pour des infrastructures, style station d'épuration. Si on veut maintenant en construire une, il faudra aller assez loin du centre et faire suivre le flot d'eaux usées à l'aide de pompes. Mais ça risque de coûter cher en énergie et en conduites pour tout refouler...
Selon le Rapport mondial sur le développement humain (PNUD, 2006), un dollar investi dans le secteur de l’assainissement en rapporte en moyenne 8 grâce à une baisse des coûts et au gain de productivité. Par ailleurs, le préjudice lié au manque d’accès à l’eau et l’assainissement cause, dans les pays en développement, la perte de 443 millions de jours de scolarité chaque année en raison des maladies véhiculées par l’eau. L’Afrique subsaharienne perd environ 5% de son PIB, soit quelque 28,4 milliards de dollars chaque année: un chiffre qui dépasse le montant total de l’aide et de l’allègement de la dette alloué à la région chaque année.
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