vendredi 17 avril 2009

Les leaders politiques, cibles des tazarchistes*



Ecrit par A. Coulibaly (OPINIONS N° 76 du 14 AVRIL 2009),

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Zaki, Omar et Ousmane‘’Elle court, elle court’’ la rumeur au Niger en cette fin de mandature. Les plus folles les unes que les autres. Elle prend parfois l’allure de simples imbécillités propagées sur tous les toits, et plus la ficelle est grosse, plus on pense qu’elle est invisible et qu’elle a des chances d’être accréditée. La rumeur est un couteau à double tranchant, car elle peut servir les nobles causes, mais en général, elle sert beaucoup plus les intentions inavouées, les compromissions bâtardes, les opérations mafieuses. Chez nous au Niger, ces derniers temps, la rumeur a visiblement choisi son camp, sa cause, et a défini son modus operandi (mode opératoire). Son objet, c’est jeter l’opprobre et le discrédit sur les leaders politiques afin de montrer la blancheur et la propreté qui font de Tandja un messie, un don de Dieu pour le peuple nigérien. Pour cette ‘’angélisation’’ du personnage, tous les moyens sont bons, tous les qualificatifs dévalorisants contre la classe politique actuelle sont recherchés avec la plus grande minutie. Le manège est simple : pour que survive et se pérennise le mouvement ‘’Tazarché’’, il faut tuer les autres, ainsi, faute de combattants, on ‘’tazarchera’’ en rond ! Et comme dans toute entreprise humaine il faut un sacrifice, parfois jusqu’au sacrifice ultime, alors pour le triomphe de la cause ‘’tazarchiste’’, ‘’les féticheurs’’ et autres marabouts de mauvais augures, semblent avoir exigé trois têtes :

Issoufou Mahamadou, Seini Oumarou et Mahamane Ousmane. Quel crime ces trois personnalités ont-elles commis au point de constituer ainsi ‘’l’offrande’’ sur l’autel ‘’tazarchiste’’ ? Leur pêché, selon le Livre révélé des ‘’tazarchistes’’, pour Issoufou et Ousmane, est relatif à leur non adhésion au conformisme ambiant qui fait de la Constitution nigérienne une simple ordonnance médicale du Dr Tandja ! En ce qui concerne Seini Oumarou, le nouveau patron du MNSD, son mutisme face au ‘’Tazarché’’ équivaudrait également à un crime odieux. La sentence rendue par le Tribunal tazarchiste présidé par l’obscur Dan Dubai, assisté de ses deux assesseurs qui sont, Ibrahim Hamidou et Daouda Diallo, le premier, patron de Tribune du Peuple, pardon Tribune de Tandja aujourd’hui, et le second, césar du Conseil Supérieur de la Communication (CSC), et enfin, l’inénarrable Abdouramane Hima assurant les fonctions de Procureur, est ainsi libellée :

à défaut de les éjecter de la direction de leur parti, on va faire leur bonheur malgré eux, c’est plus simple. Issoufou Mahamadou est bombardé futur Premier Ministre du gouvernement tazarchiste, Seini Oumarou est envoyé au perchoir remplacer Mahamane Ousmane qui ira se faire cuire un oeuf à … l’ONU ! La contradiction et le ridicule ne tuant pas au Niger, certains serviteurs de la cause tazarchiste sont allés jusqu’à menacer d’inéligibilité tous les leaders politiques qui ne danseraient pas le rythme si envoûtant du Tazarché pendant trois ans ! A la vérité, les serviteurs de la cause tazarchiste ne rendent point service à la classe politique nigérienne dans son ensemble, mais aussi à tout le Niger quand ils font courir à notre pays les risques d’une grave instabilité qui naîtrait de la volonté d’un passage en force pour régenter le pays.

La stabilité politique et institutionnelle tant vantée au Niger ces dix dernières années n’aura été retrouvée qu’au prix de multiples efforts consentis par toutes les forces politiques et sociales du pays, majorité comme opposition et partenaires sociaux. Ce serait niais d’attacher cette stabilité à la seule personne du Président Tandja, comme si ce dernier évoluait en vase clos. Un adage du terroir ne dit-il pas qu’il faut être à deux pour casser une calebasse, mais aussi deux pour faire la paix ? En effet, prenant conscience de sa responsabilité historique dans les périodes d’instabilité chronique qu’avait connue le pays dans la décennie 90, la classe politique nigérienne, majorité comme opposition, avait compris la nécessité de promouvoir de nouveaux rapports politiques basés sur la paix et le patriotisme.

La majorité gouverne et l’opposition s’oppose, dans un cadre constructif. Le CNDP est d’ailleurs né de cette volonté commune de ‘’civiliser’’ et de pacifier les rapports politiques. Grâce à cette nouvelle vision politique, le Niger a su retrouver la voie de la stabilité, gage de tout développement durable. En dépit de ce rapprochement, l’opposition est toujours restée équidistante du pouvoir, malgré les multiples sollicitations dont elle avait été l’objet pour entrer dans un gouvernement d’union nationale, comme un peu partout en Afrique. Les exemples d’une opposition cannibalisée par le souci de participer au banquet foisonnent du Sénégal avec Wade plusieurs fois ministre de Diouf, au Gabon et en Centrafrique ! Chez nous, pas une seule fois, en dix ans, l’opposition n’a souhaité entrer dans un gouvernement.

Le seul ‘’cadeau’’ fait au Président Tandja avait constitué le vote de la Loi de Finances 2009 afin qu’il termine bien son dernier mandat. Nulle faiblesse dans cet acte, mais simplement la matérialisation d’une philosophie constructive dans un cadre démocratique apaisé. D’ailleurs, la richesse de notre cadre démocratique a largement débordé les frontières nationales et a pris une autre envergure avec le vote de la motion de censure contre le gouvernement de Hama Amadou, le 31 mai 2007, une expérience inédite en Afrique. La presse dans sa composante indépendante est florissante, même si quelquefois elle a maille partir avec les princes qui nous gouvernent.

Mais qu’aujourd’hui, des énergumènes de tout acabit, des démocrates de la vingt cinquième heure, pour des intérêts purement égoïstes et personnels, veuillent remettre en cause tout cet important capital d’expériences acquises sur la voie de la démocratisation et de la stabilisation, constitue un grave recul pour notre pays. Les Nigériens ont trop souffert et beaucoup avalé de couleuvres pour accepter de se faire niquer au bout du compte ! A l’endroit du Président de la République, nous rappelons qu’il n’existe aucun ‘’mais’’ dans la formulation de son serment constitutionnel .C’est une formule entière qui forme un bloc. La respecter, c’est respecter le Niger et son peuple tout entier.

Toute autre alternative est un parjure, une forfaiture, et nous avons trop d’estime pour l’officier supérieur que fut Tandja pour l’enfermer dans la catégorie infamante de gens qui ne respectent point leur parole. Les Nigériens avaient espéré qu’il sortirait de sa réserve pour renvoyer les fossoyeurs de la démocratie à leurs désillusions par un langage clair et ferme, montrant du coup qu’il n’était pas seulement grand de taille, mais qu’il était aussi un grand homme d’Etat. Hélas, sa sortie catastrophique pour faire allusion à un bonus de trois ans supplémentaires n’est pas pour rassurer les Nigériens sur décembre 2009. Le Président Tandja rendrait un immense service au Niger s’il écoutait plus la voie de la raison que celle du coeur en ces moments dramatiques, car l’Histoire s’écrit toujours avec la raison qu’avec le coeur.

Qu’il veuille bien tirer sa révérence en décembre prochain, car construire un pays est une oeuvre commencée mais jamais finie, qui se poursuit de générations en générations du seul fait de cette loi naturelle qui fait que nul n’est éternel en dehors de Dieu. D’autres Nigériens, tous aussi patriotes que lui, pourront demain continuer l’exaltante mission de construction nationale. Tel doit être le testament politique, non écrit, de tout homme d’Etat au soir de sa carrière. Pour notre part, que ce soit Issoufou Mahamadou, Mahamane Ousmane ou Seini Oumarou ou tout autre Nigérien que les électeurs désigneront en décembre 2009, nous lui souhaiterons beaucoup de baraka, de sagesse et de patriotisme pour relever le défi de la pauvreté et du sous développement, le seul combat qui vaille !

Les spécialistes de la mécanique de l’âme humaine enseignent que l’usage abusif du pouvoir conduit à la démence, la folie et que la démesure (*chantiomanie) aveugle qui trop longtemps la côtoie ! C’est lourd, très lourd de sens. A méditer. Lexique des mots nouveaux *Tazarché : mot haoussa signifiant continuation, mais dans la pratique il constitue un hold up, et plus gravement un coup d’Etat. Le tazarché est l’appel du coeur d’affairistes sans foi ni loi, de bandits d’Etat, consistant à suspendre la Constitution après deux mandats constitutionnels et promouvoir un régime d’exception de trois ans.

*Tazarchiste : partisan de la violation de la Constitution nigérienne afin d’instaurer une présidence à vie comme au Gabon, au Cameroun, au Zimbabwe ou en Algérie pour ne citer que les exemples les plus achevés des potentats africains. C’est-là une espèce de citoyens, largement minoritaires, qui savent que les positions de rente qu’ils occupent aujourd’hui, ils ne le doivent qu’à leur servilité et, bien des fois, surtout à leur médiocrité. C’est comme ça que fonctionne la médiocratie. Ils ignorent la loi de la nature qui fait que, par essence, nous sommes mortels, donc appelés à quitter un jour la scène et que nul n’est irremplaçable dans la vie d’un Etat. Avant Tandja, le Niger a existé, après lui, on tournera la page.

C’est ainsi, et c’est inéluctable ! *Chantiomanie : mot dont l’origine remonte au substantif chantier, fabriqué par votre serviteur et non encore homologué par le Larousse, mais qui constitue, indéniablement, un enrichissement de la langue française. Il signifie cette propension à ‘’poser des premières pierres’’ partout où peuvent aller les caméras de Télé Sahel et donnant l’inextinguible fausse impression qu’on travaille malgré, environ, sept ans de repos ! Aujourd’hui donc, notre ‘’Président Bien Aimé ‘’ carbure à la ‘’pose de la première pierre’’ chaque mois ! M’enfin, si ça peut lui faire plaisir et l’occuper pour qu’il ne touche pas à notre Constitution qui lui fait ‘’grandement plaisir’’, on s’en fout, qu’il continue donc !
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