jeudi 1 janvier 2009

Meilleurs voeux de nouvel an ,inspirés du discours de Matin Luther King



Il y a un siècle de cela, un grand Américain Martin Luther King qui nous couvre aujourd’hui de son ombre symbolique signait une Proclamation d’Emancipation. Ce décret capital se dresse comme un grand phare illuminant d’espérance les millions de nomades sahariens marqués au feu d’une brûlante injustice. Ce décret est venu comme une aube joyeuse terminer la longue nuit de leur captivité pensait-on.

Mais, cent ans plus tard, les Touaregs nomades ne sont toujours pas libres. Cent ans plus tard, la vie des Touaregs est encore terriblement handicapée par les menottes de la ségrégation et les chaînes de la discrimination. Cent ans plus tard, les Touaregs vivent à l’écart sur leur îlot de pauvreté au milieu d’un vaste océan de prospérité matérielle. Cent ans plus tard, les Touaregs se languissent encore dans les coins de la société nigéro-malienne et se trouvent exilés dans leur propre pays.

Quand les architectes de notre République ont magnifiquement rédigé notre Constitution de la Déclaration d’Indépendance, ils signaient un chèque dont tout nigérien ou malien devait hériter. Ce chèque était une promesse qu’à tous les hommes, aux Touaregs nomades comme aux sédentaires, seraient garantis les droits inaliénables de la vie, de la liberté et de la quête du bonheur.

Il est évident aujourd’hui que l’Afrique a manqué à ses promesses à l’égard de ses citoyens de couleur. Au lieu d’honorer son obligation sacrée, l’Afrique a délivré au peuple Nomade un chèque en bois, qui est revenu avec l’inscription “ provisions insuffisantes ”. Mais nous refusons de croire qu’il n’y a pas de quoi honorer ce chèque dans les vastes coffres de la chance, en notre Continent. Aussi, sommes-nous venus encaisser ce chèque, un chèque qui nous donnera sur simple présentation les richesses de la liberté et la sécurité de la justice.

Nous sommes également venus en ce lieu sacrifié pour rappeler à l’Afrique les exigeantes urgences de l’heure présente. Ce n’est pas le moment de s’offrir le luxe de laisser tiédir notre ardeur ou de prendre les tranquillisants des demi-mesures. C’est l’heure de tenir les promesses de la démocratie. C’est l’heure d’émerger des vallées obscures et désolées de la ségrégation pour fouler le sentier ensoleillé de la justice raciale. C’est l’heure d’arracher notre nation des sables mouvant de l’injustice raciale et de l’établir sur le roc de la fraternité. C’est l’heure de faire de la justice une réalité pour tous les enfants maliens et nigériens. Il serait fatal pour ces nations de fermer les yeux sur l’urgence du moment. Ces étouffants étés du légitime mécontentement des Nomades touaregs ne se terminera pas sans qu’advienne un automne vivifiant de liberté et d’égalité.

1963 n’est pas une fin, c’est un commencement au Mali. Ceux qui espèrent que les Touaregs ont seulement besoin de se défouler et qu’ils se montreront désormais satisfait, auront un rude réveil, si leurs nations retournent à leur train-train habituel.

Il n’y aura ni repos ni tranquillité en Afrique jusqu’à ce qu’on ait accordé au peuple Touareg ses droits de citoyen. Les tourbillons de la révolte ne cesseront d’ébranler les fondations de leurs nations jusqu’à ce que le jour éclatant de la justice apparaisse.

Mais il y a quelque chose que je dois dire à mon peuple, debout sur le seuil accueillant qui donne accès au palais de la justice : en procédant à la conquête de notre place légitime, nous ne devons pas nous rendre coupables d’agissements répréhensibles.

Ne cherchons pas à satisfaire notre soif de liberté en buvant à la coupe de l’amertume et de la haine. Nous devons toujours mener notre lutte sur les hauts plateaux de la dignité et de la discipline. Nous ne devons pas laisser nos revendications créatrices dégénérer en violence physique contre nos autres frères citoyens. Sans cesse, nous devons nous élever jusqu’aux hauteurs majestueuses où la force de l’âme s’unit à la force physique.

Le merveilleux esprit militant qui a saisi la communauté touarègue ne doit pas nous entraîner vers la méfiance de tous les autres frères, car beaucoup de nos frères sédentaires, leur présence ici aujourd’hui en est la preuve, ont compris que leur destinée est liée à la nôtre. L’assaut que nous avons monté ensemble pour emporter les remparts de l’injustice doit être mené par une armée bi-raciale. Nous ne pouvons marcher tout seul au combat. Et au cours de notre progression il faut nous engager à continuer d’aller de l’avant ensemble. Nous ne pouvons pas revenir en arrière.

Il y a des gens qui demandent aux militants des Droits Civiques : “ Quand serez-vous enfin satisfaits ? ” Nous ne serons jamais satisfaits aussi longtemps que les Touaregs seront les victimes d’indicibles horreurs de la brutalité policière et militaire. Nous ne pourrons être satisfaits aussi longtemps que nos corps, lourds de la fatigue des voyages, ne trouveront pas un abri dans nos villes.

Nous ne pourrons être satisfaits aussi longtemps que la liberté de mouvement Touareg ne lui permettra guère que d’aller d’un petit ghetto à un ghetto plus grand. Nous ne pourrons être satisfaits aussi longtemps que nos enfants, même devenus grands, ne seront pas traités en adultes et verront leur dignité bafouée par les panneaux “ Réservé aux sédentaires et aux sudistes ”. Nous ne pourrons être satisfaits aussi longtemps qu’un Touareg de Kidal ou d'Agadez ne pourra pas voter et qu’un Touareg du Massif de L'Aïr croira qu’il n’a aucune raison de voter. Non, nous ne sommes pas satisfaits et ne le serons jamais, tant que le droit ne jaillira pas comme l’eau, et la justice comme un torrent intarissable.

Je n’ignore pas que certains d’entre vous ont été conduits ici par un excès d’épreuves et de tribulations. D’aucuns sortent à peine d’étroites cellules de prison. D’autres viennent de régions où leur quête de liberté leur a valu d’être battus par les orages de la persécution et secoués par les bourrasques de la brutalité policière et militaire. Vous avez été les héros de la souffrance créatrice. Continuez à travailler avec la certitude que la souffrance imméritée vous sera rédemptrice.

Retournez dans l'Aïr, retournez dans l'Azawak, retournez dans l'Azawad retournez dans le Ténéré, retournez dans la boucle du fleuve Niger, retournez dans les taudis, les bidonvilles et les ghettos des villes du Nord et du Sud, sachant que de quelque manière que ce soit cette situation peut et va changer. Ne croupissons pas dans la vallée du désespoir.

Je vous le dis ici et maintenant, mes amis, bien que, oui, bien que nous ayons à faire face à des difficultés aujourd’hui et demain je fais toujours ce rêve : c’est un rêve profondément ancré dans l’idéal africain. Je rêve que, un jour, nos pays se lèveront et vivront pleinement la véritable réalité de leurs crédos : “ Nous tenons ces vérités pour évidentes par elles-mêmes que tous les hommes sont créés égaux ”.

Je rêve qu’un jour sur les collines bleues de l'Aïr les fils de nomades et ceux des propriétaires de l'administration et des champs pourront s’asseoir ensemble à la table de la fraternité.

Je rêve qu’un jour, même les Etats du Mali et du Niger, des Etats où brûlent les feux de l’injustice et de l’oppression, seront transformés en des oasis de liberté et de justice.

Je rêve que nos enfants vivront un jour dans une nation où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur la valeur de leur caractère. Je fais aujourd’hui ce rêve !

Je rêve qu’un jour, même à Niamey et Bamako, avec leurs abominables racistes, avec leurs gouvernements à la bouche pleine des mots "extermination" et “ arrestations ” des nomades, que là même dans ces deux capitales, un jour les petits garçons nomades et les petites filles sédentaires pourront se donner la main, comme frères et sœurs. Je fais aujourd’hui ce rêve !

Je rêve qu’un jour toute la vallée sera relevée, toute colline et toute montagne seront rabaissées, les endroits escarpés seront aplanis et les chemins tortueux redressés, la gloire du Seigneur sera révélée à tout être fait de chair.

Telle est notre espérance. C’est la foi avec laquelle je vous écris .

Avec cette foi, nous serons capables de distinguer dans la montagne du désespoir une pierre d’espérance. Avec cette foi, nous serons capables de transformer les discordes criardes de nos nations en des superbes symphonies de fraternité.

Avec cette foi, nous serons capables de travailler ensemble, de prier ensemble, de lutter ensemble, d’aller en prison ensemble, de défendre la cause de la liberté et de la justice ensemble, en sachant qu’un jour, nous serons libres. Ce sera le jour où tous les enfants de Dieu pourront chanter ces paroles qui auront alors un nouveau sens : “ Mon pays, c’est toi, douce terre de liberté, c’est toi que je chante. Terre où sont morts mes pères, terre dont les pèlerins étaient fiers, que du flanc de chacune de tes montagnes, sonne la cloche de la liberté ! ” Et, si l’Afrique doit être un grand continent, que cela devienne vrai.

Que la cloche de la liberté sonne du haut des merveilleuses collines de l'Adrar des Iforas !
Que la cloche de la liberté sonne du haut des montagnes grandioses de l'Aïr !
Que la cloche de la liberté sonne du haut des sommets des Aders !
Que la cloche de la liberté sonne du haut des cimes neigeuses des montagnes de la Berbérie !
Que la cloche de la liberté sonne depuis les pentes harmonieuses du fleuve Niger !

Mais cela ne suffit pas.

Quand nous permettrons à la cloche de la liberté de sonner dans chaque village, dans chaque hameau, dans chaque ville et dans chaque Etat, nous pourrons fêter le jour où tous les enfants de Dieu, les Noirs et les Blancs, les Juifs et les non-Juifs, les chiites et les sunites, les Protestants et les Catholiques, pourront se donner la main et chanter les paroles du vieux Ishumar Spirituels : “ Enfin libres, enfin libres et réconciliés , grâce en soit rendue au Dieu tout puissant, nous sommes enfin libres ! ”.

CDT/Tango/Montagnes de L'Aïr.

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