- Vendredi, 20 Janvier 2012
- Écrit Par Khado Ag Ghousmane
Plus les jours passent, plus l'armée malienne fait déchanter et fait revivre les mêmes évènements qui l'ont rendu tristement célèbre dans la mémoire de tout Azawadien. Depuis l'attaque de Ménaka qui a lancée la révolution actuelle au Mali, cette armée, au lieu de briller par son professionnalisme, son sang-froid, et sa clairvoyance, fait sombrer encore plus le pays dans le chaos. Les exécutions sommaires aussi bien de civils que de militaires redeviennent monnaie courante.
Depuis une dizaine d'année, il était devenu slogan de clamer «Vive l'Armée Professionnelle, et Multiethnique du Mali». Multiethnique, cette armée l'est surement à cause de ces composantes représentant l'ensemble du Mali. Professionnelle, on a bien voulu croire qu'elle l'était. Après le 23 Mai 2006, une grande vague de désertion a été évité au sein de l'armée Malienne à cause de ce slogan et du leadership de certains membres de l'Alliance pour la Démocratie et le Changement (ADC). Vu la maitrise par les leaders de l'ADC de leur troupes, il n'y a pas eu d'attaques contre les installations militaires, par conséquent cette armée n'a pas été mise à l'épreuve, aidée évidemment par l'absence continu de désertion.
Les faits confirment que 2006 n'est pas 2012. Cette année 2012 nous mène plutôt vers le même chemin tragique que cette armée nous a fait traverser durant la rébellion des années 1990. Des exécutions sommaires à cause du simple fait d'être Tamasheq sont entreprises par cette armée sur base haineuse. Nous notions dans une de nos publications du Mercredi que l'armée perquisitionne, interpelle, et torture des civils à Kidal. Ces pratiques qui rappellent les évènements des années 1994 dans cette ville se sont intensifiées depuis. La confiscation des voitures et des téléphones portables continue. La ville est toujours fermée, ne permettant à aucun civil ou même déserteur de l'armée de sortir.
Cette armée vient de franchir une nouvelle étape qui la fait ressemblée un peu plus à ce qu'elle était il y a 20 ans. Hier à Ménaka, elle a tiré sur deux civils Tamasheq dont les seules fautes furent de se trouver au mauvais endroit, au mauvais moment. Ces deux civils dont nous n'avons pu confirmer l'identité passaient devant un groupe de bérets rouges maliens. Sans sommation, ni explication, cette armée a commencé à ouvrir le feu sur ces deux civils. L'un d'entre eux mourra sur place, le sort de l'autre ayant subi de graves blessures est inconnu parce qu'entre les mains de ces bourreaux. Cette exécution est l'expression d'une armée en déroute qui perd le contrôle de la situation. Ne maîtrisant plus rien, comme dans sa tradition ô combien sombre, elle s'attaque à des civils innocents pour extérioriser et sa haine et son impuissance. Plus les exécutions sommaires et extra-judiciaires de civils continueront, plus les soutiens du Mali et de son armée diminueront, et plus le chaos s'installera. Cette armée a toutes les raisons de se ressaisir avant qu'il ne soit trop tard.
Dans cette même ville de Ménaka, cette armée est allée encore plus loin. Le Colonel Didier Dakouo, Chef du Secteur de Gao, et l'un des officiers supérieurs les plus respecté de l'Etat-major du Mali a exécuté 5 militaires Tamasheq qui étaient sous son ordre. Nous reviendrons dans nos prochaines éditions sur l'histoire de ces militaires Tamasheq morts sous les balles de leur frères d'armes, et dont les seuls tord ont été d'être Tamasheq et d'avoir cru à tort que cette armée dite «professionnelle et multiethnique» était aussi la leur.
Cette exécution de militaires Tamasheq par leurs frères d'armes est la résultante d'une profonde cassure au sein de cette armée. Les militaires du Sud du Mali manquant de confiance en leurs frères d'armes Tamasheq et Arabes, ont fini par pousser ces derniers à s'isoler. Cette fracture, indigne d'une armée dite «professionnelle et multiethnique» aura une fois de plus le contraire de l'effet espéré : encourager les désertions et le renforcement des rangs du MNLA.
Cette absence de confiance a fini par pousser le Colonel Intallah Ag Sayid, Commandant-Adjoint de la zone de défense de Sevaré à déserter l'armée Malienne pour rejoindre le MNLA avec des combattants et une dizaine de véhicules. Selon nos sources, cette désertion n'est que le début d'un long phénomène dans lequel la crise de confiance entrainera la panique de cette armée qui exécutera des civils et militaires Tamasheq, et entrainera encore plus de désertion. Lorsque l'on sait que la majorité du convoi de l'armée Malienne combattant le MNLA est constitué d'Arabo-Tamasheq, nous ne pouvons qu'imaginer le risque pour l'intégrité territoriale du Mali que représentent ces actions.
Toumast Press
Par Khado Ag Ghousmane